STATUT DU MARIN PÊCHEUR

POUR LES MARINS PÊCHEURS ET LES ARMATEURS

En 2013, le statut du marin pêcheur, régime dérogatoire au régime commun du droit du travail, est adopté par la loi du pays n°2013-02 du 14 janvier 2013. Ce régime dérogatoire permet aux pêcheurs hauturiers et côtiers d’accéder, malgré les spécificités de leur milieu professionnel et des conditions de travail inhérentes, au statut de salarié, bénéficiant d’un contrat de travail et d’une couverture sociale.

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SOMMAIRE

  1. Pourquoi un statut pour les marins-pêcheurs ?
  2. Mode d’emploi de ce guide de présentation du statut
  3. Pour être marin pêcheur
  4. Les premières formalités à accomplir pour l’employeur
  5. Les formalités à accomplir vis-à-vis des salariés
  6. Suspension et rupture des contrats de travail
  7. Le livret professionnel du marin pêcheur (Arrêté n°2240 du 28 décembre 2011)
  8. Les conditions de travail
  9. La rémunération : le salaire du marin pêcheur   (LP Partie 1, titre II, chapitre V et Arrêté  N° 2242 du 28 Décembre 2011)
  10. La protection sociale et la retraite du marin pêcheur (LP Partie 2)
  11. Fiche récapitulative : Les droits et les devoirs du marin pêcheur
  12. Fiche récapitulative : Les droits et les devoirs de l’armateur
  13. Fiche récapitulative : Les procédures à suivre

1. Pourquoi un statut pour les marins-pêcheurs ?

Le tribunal de première instance de Papeete a, dans un jugement du 5 octobre 1999, reconnu la qualité de salarié aux personnes travaillant sur un bateau de pêche

Les pêcheurs employés à bord des navires de pêche polynésiens (thoniers, bonitiers, poti marara) ne sont ainsi pas en règle vis-à-vis de la réglementation du travail. Il est en effet important que les pêcheurs bénéficient d’une couverture sociale (maladie et accidents du travail), de congés payés, d’une retraite et d’un salaire garanti chaque mois, et ce, quels que soient les résultats de la pêche.

Les pêcheurs employés à bord d’un navire de pêche (thonier, bonitier, poti marara – de la 1e à la 4e catégorie de navigation) et ne travaillant pas directement pour leur compte, sont soumis aux ordres de leur capitaine à bord qui représente l’armateur, propriétaire du navire. Ce lien hiérarchique avec le capitaine, patron à bord, est appelé « lien de subordination ». Ceci signifie que le marin travaille directement sous les ordres d’un patron et est donc considéré comme un salarié.

Cette situation fait que les marins employés à bord d’un navire sont soumis au Régime Général des Salariés (RGS), autrement appelé régime commun du droit du travail, comme l’a maintes fois rappelé le tribunal administratif de Papeete.

Les propriétaires de bateau embarquant en tant que capitaines continuent à dépendre du Régime des Non Salariés (RNS). Ils peuvent exercer en tant que patenté, ou si leurs revenus mensuels sont inférieurs à 87 346 Fcfp, souscrire au Régime de Solidarité de la Polynésie française (RSPF qui était anciennement le RST).

Le régime commun du droit du travail n’est pas adapté aux spécificités de la pêche, car ce régime a été initialement créé pour les employés terrestres. Il a donc été nécessaire de mettre en place un régime spécifique correspondant aux conditions d’emploi des marins pêcheurs et adapté à leurs conditions de travail. C’est un régime dérogatoire au régime commun du droit du travail, tenant compte des principes généraux du droit du travail et des conventions internationales.

A compter du 1er janvier 2012, le « statut » du marin pêcheur s’applique donc à tout marin embarqué sur un navire de pêche (thonier, bonitier ou poti marara). Le marin-pêcheur devient un salarié, avec un contrat de travail. Il peut donc prétendre à des emprunts bancaires, bénéficie d’une protection sociale et cotise pour une retraite à la Caisse de Prévoyance Sociale (CPS) en étant affilié au RGS.

2. Mode d’emploi de ce guide de présentation du statut

Ce guide s’adresse à tous ceux qui souhaitent comprendre les nouvelles règles qui encadrent le métier de pêcheur depuis le 1er janvier 2012. Il s’adresse aussi aux armateurs qui auront de nouvelles responsabilités envers leurs marins, et à toute personne voulant s’informer des évolutions sociales qui structurent peu à peu le milieu de la pêche professionnelle en Polynésie française.

Ce document résume et explique les textes de loi qui définissent les dispositions applicables aux marins pêcheurs. Ces textes (Loi de Pays n °2011-21 LP/APF du 8 août 2011 et arrêtés associés) sont les documents qui font foi pour tout recours juridique.

Ce guide accompagne les professionnels de la pêche dans l’application des nouvelles mesures du statut du pêcheur.

Chaque partie du présent document se réfère à un titre, chapitre ou article d’un texte de loi, afin que le lecteur puisse retrouver dans l’annexe la formulation originale parue au journal officiel de la Polynésie française.

Dans chaque partie seront mis en évidence les points les plus importants à retenir et à la fin du document, des fiches thématiques récapitulatives seront présentées.

Des compléments concernant le code du travail applicable en Polynésie française sont disponibles sur http://www.servicedutravail.gov.pf/spip.php?rubrique365

3. Pour être marin pêcheur

Pour exercer la profession de marin, l’intéressé doit remplir quatre conditions cumulatives :

  1. la nationalité
  2. l’aptitude physique
  3. la formation professionnelle
  4. la moralité (absence de condamnation pénale)

(cf. décret n° 61-369 du 11 avril 1961 relatif à l’exercice de la profession de marin à bord des navires immatriculés dans les territoires d’outre-mer de la République)

Un marin pêcheur manipule des produits destinés à alimenter la population. Pour cette principale raison, le marin se doit de suivre des règles d’hygiène strictes et de prendre soin des poissons qu’il manipule.

D’une manière générale, un marin pêcheur doit :

  • être en bonne santé, pour pouvoir embarquer en mer, y rester parfois plusieurs jours ou plusieurs semaines, ne pas contaminer les produits qui seront ensuite vendus et ses collègues avec lesquels il vit à bord.
  • aimer la mer et la respecter, respecter l’environnement marin et les êtres vivants qui le peuplent.
  • supporter de vivre en communauté, dans un milieu réduit. La pêche est un travail d’équipe. Pour qu’elle se déroule bien, chaque marin a son importance, chaque poste est essentiel. Pour que la vie à bord et les conditions de travail soient agréables pour tous, chaque marin doit faire preuve de bonne volonté et accepter de vivre et travailler avec les autres marins embarqués.
  • être au moins âgé de 16 ans, et dégagé de ses obligations scolaires pour établir un contrat de travail.

Afin de détenir une qualification adaptée notamment aux risques du métier, il est recommandé  au marin de passer une formation Certificat d’Initiation Nautique spécifique à la pêche (CIN).

4. Les premières formalités à accomplir pour l’employeur

Enregistrement à la Direction des Ressources Marines (DRM)

L’armement devra fournir au comptable de la Direction des Ressources Marines son RC, son N° Tahiti, ses statuts et son RIB. Ces pièces permettront à l’armement de se faire rembourser la part des cotisations prise en charge par le Pays.

Immatriculation à la CPS

Référence : http://www.cps.pf/espace-employeur/vos-formulaires/repertoire-des-employeurs

L’armement devra également s’immatriculer en tant qu’employeur auprès de la CPS en remplissant le formulaire « répertoire des employeurs » (figure 1) et en fournissant les pièces justificatives demandées (N° Tahiti, RC, statuts de l’entreprise).

Ces deux formalités ci-dessus auprès de la Direction des Ressources Marines (DRM) et de la CPS ne sont à faire qu’une seule fois, lors de la mise en place du statut.

En revanche, les deux formalités suivantes (DPAE et contrat d’engagement) sont à renouveler à chaque embauche.

5. Les formalités à accomplir vis-à-vis des salariés

La DPAE : Déclaration Préalable A l’Embauche

Référence : http://www.cps.pf/espace-employeur/demarches-et-formalites/vous-embauchez-un-salarie/pourquoi-faire-une-declaration-prealable-l-embauche

L’engagement d’un marin est obligatoirement précédé d’une DPAE (déclaration préalable à l’embauche – figure 2) qui doit être déposée (ou envoyée par fax ou mail) à la CPS au plus tard le jour de l’embauche, avant le départ du bateau.

Le Contrat d’engagement maritime (LP Partie 1, titre II, chapitre 1er et Arrêté  N°2241 du 28/12/11)

Le contrat de travail ou « contrat d’engagement maritime » est un accord écrit par lequel une personne (l’employé) s’engage à effectuer un travail pour une autre personne (l’employeur) en échange d’un salaire.

Dans le secteur de la pêche, le marin pêcheur est au service de l’armateur qui lui verse un salaire en échange de son travail. Ce salaire est proportionnel au résultat de la pêche (part de pêche) et ne peut être inférieur à un minimum appelé Salaire Plancher Pêche (SPP).

Le contrat d’engagement maritime est obligatoire. Ce contrat est signé par l’armateur et le marin pêcheur préalablement à tout embarquement.

Les types de contrat

2 types de contrat de travail sont possibles :

  • le Contrat à Durée Indéterminée (CDI – figure 3)
  • le Contrat à Durée Déterminée (CDD)

Le CDI est fait pour un travail permanent et durable dans l’armement.

Le CDD sert uniquement à :

  • remplacer un membre d’équipage momentanément absent ;
  • faire face à une charge de travail exceptionnellement importante (si la pêche est vraiment très bonne à cette période et que ce n’était pas prévu par exemple) ;
  • réaliser une tâche occasionnelle précise et qui ne dure pas longtemps.

Pour travailler longtemps et de manière stable dans un même armement, on ne peut pas cumuler plus de 3 CDD sur une période de 2 ans, renouvellement compris. L’armateur doit embaucher le marin en CDI au delà de 2 ans de CDD.

Dans le cas du remplacement d’un membre d’équipage, le CDD peut ne pas avoir de durée fixe et peut excéder 2 ans, jusqu’au retour du marin absent.

Le CDD donne droit à une indemnité de « précarité ». Ceci est un supplément de salaire pour compenser le fait que sa situation est instable. Cette indemnité correspond à 6 % des salaires bruts perçus pendant toute la durée du CDD, c’est à dire qu’on inclut aussi le paiement des congés pour calculer cette indemnité.

Le CDD et le CDI ne sont pas limités au travail en mer. Ils comprennent dans leur durée du travail à terre et du repos à terre.

Le type de contrat de travail, CDI ou CDD, doit être écrit sur la liste d’équipage.

Éléments devant figurer dans le contrat

Le contrat doit obligatoirement définir les éléments suivants :

  • la date de début d’embauche ;
  • la durée de la période d’essai ;
  • la fonction du marin à bord ;
  • le nombre de jours de mer pour lequel il est employé (240 jours étant pour un temps plein) ;
  • la part de pêche fixe et la part variable auxquelles il a le droit ;
  • La liste des charges communes ;
  • Le calcul de la part de pêche ;
  • La répartition des parts de l’équipage par fonction exercée à bord ;
  • Les cas de suspension et de rupture du contrat.

En l’absence de précision dans le contrat sur le nombre de jours de mer que le marin doit effectuer, la durée est de 240 jours de mer par défaut.

La part fixe est une part de base qui se réfère en général à la fonction exercée à bord. La part variable s’établit selon le résultat de la pêche ou la qualité du travail qui a été fait à bord, à l’appréciation du capitaine.

Par exemple un pêcheur pourra avoir sur son contrat

«  part fixe = 1 et amplitude des parts variables = 0.2 »

Ceci voudra dire que ce pêcheur pourra toucher entre 0,8 et 1,2 de part de pêche, autrement dit entre 1- 0,2 et 1 + 0,2.

La période d’essai :

Le contrat peut comporter une « période d’essai ». Cela veut dire que pendant cette période, le marin pêcheur a le droit de partir sans préavis si le travail ne lui convient pas, ou l’armateur a le droit de rompre le contrat de son employé, sans préavis, si son travail ne le satisfait pas.

Pour un CDI, cette période de test correspond à 60 jours de mer et au maximum à 3 mois calendaires.

Pour un CDD, elle est de :

  • 1 mois si le contrat est de plus de 6 mois
  • 1 jour par semaine de contrat dans la limite de 2 semaines si le contrat est de moins de 6 mois.

Une fois ce délai passé, si l’employé souhaite arrêter de travailler, il doit démissionner, et si son armateur ne veut pas le garder, il doit le licencier. Il y aura alors davantage de formalités administratives à faire et une période de préavis à respecter.

La déclaration de salaire

Référence : http://www.cps.pf/espace-employeur/demarches-et-formalites/vous-declarez-un-salarie/declaration-de-salaires-et-de-main-d-oeuvre-dmo

Les armateurs sont obligés de déclarer les salaires réels versés à leurs marins chaque fin de mois, ou au plus tard le 10 du mois suivant.

Une fiche spéciale est à remplir pour l’ensemble des marins. Cette fiche doit être déposée (ou envoyée par fax ou mail) à la CPS au plus tard le 10 du mois suivant.

Une copie de cette fiche doit être déposée (ou envoyée par fax ou mail) à la Direction des Ressources Marines (DRM) dans les mêmes délais pour que le Pays puisse procéder rapidement au remboursement d’une partie des cotisations sociales.

6. Suspension et rupture des contrats de travail

La suspension du contrat de travail (LP Partie 1, titre II, chapitre II)

Le contrat de travail peut être suspendu dans les cas suivants :

  • Le navire de pêche est immobilisé du fait d’une panne ou d’une avarie qui l’empêche de naviguer ;
  • Le navire de pêche est immobilisé du fait qu’il n’a pas l’autorisation de naviguer (en attente du permis de navigation par exemple), mais à condition que l’armateur ait effectué ses demandes en bonne et due forme auprès des autorités administratives ;
  • Le marin rate le départ du bateau sur lequel il devait embarquer et l’armateur n’a pas pu le mettre sur un autre navire ou lui donner un autre travail à faire.

La suspension entraîne l’arrêt du travail du marin de manière temporaire sans pour autant occasionner la rupture du contrat de travail. Ainsi, pendant la suspension du contrat, le marin ne travaille pas et il n’est pas payé.

Cas avec période de préavis de 7 jours

Dans les cas d’immobilisation du navire, le contrat ne peut être suspendu qu’à compter du 7ème jour qui suit l’événement, après que l’armateur en ait informé par écrit les marins.

Si le bateau est immobilisé, l’employeur doit obligatoirement dire :

  • pourquoi le bateau est immobilisé ;
  • ce qu’il compte faire pour résoudre le problème ;
  • combien de temps il prévoit d’immobiliser son bateau ;
  • ce qu’il compte faire pour éviter de suspendre trop longtemps le contrat de travail de ses marins.

Le contrat d’un pêcheur peut être suspendu au maximum 30 jours. Cela peut être renouvelé une fois si l’armateur informe les marins.

Si au bout de cette période, le navire est toujours immobilisé et que ce n’est pas la faute de l’armateur, ce dernier a le droit de licencier ses employés pour raisons « économiques ». Par contre, si l’armateur est responsable de l’immobilisation prolongée, il doit de nouveau verser le Salaire Plancher Pêche à ses marins.

Cas sans période de préavis

Si le pêcheur rate le départ du bateau, et qu’il n’a pu être affecté à un autre travail par son armateur, ce dernier peut suspendre son contrat sans préavis.

A signaler également que si le marin est absent un jour où il devait travailler à terre, son absence ne sera pas payée.

Comme pour les employés à terre, le contrat peut également être suspendu dans les cas suivants, qui ne sont pas exhaustifs :

  • En cas de maladie professionnelle ou accident du travail : le marin-pêcheur est dans l’impossibilité d’exercer sa fonction ;
  • Si le marin est mis à pied : il a fait une faute grave et il est sanctionné ;
  • Si le marin est absent et qu’il a l’autorisation de son armateur ;
  • Si le marin va en prison pour des raisons sans rapport avec son activité de pêcheur.

La rupture du contrat de travail à durée indéterminée (LP Partie 1, titre II, chapitre VIII)

Il y a deux possibilités de rupture du contrat : la démission et le licenciement.

La démission

Si c’est le marin qui décide de quitter son employeur, on appelle cela « démissionner ». A partir du moment où le marin pêcheur prévient son employeur qu’il va démissionner, il doit continuer à travailler pour lui pendant une période de préavis, sauf si l’employeur est d’accord pour le laisser partir plus tôt.

Dans le cas d’une démission, que ce soit en CDD ou CDI, la période de préavis pendant laquelle le marin est obligé de continuer à travailler est de 1 mois.

Si le marin démissionne pendant sa période d’essai, il n’a pas besoin de donner de préavis.

Le licenciement

Si c’est l’armateur qui décide de ne pas garder son employé, on appelle cela « licencier ». A partir du moment où l’employeur décide de licencier son marin pêcheur, il doit lui accorder un préavis qui varie selon l’ancienneté de l’employé :

Cette période de préavis est de :

  • 1 mois, si le marin a travaillé moins de 5 ans pour cet employeur
  • 2 mois, si le marin a travaillé plus de 5 ans pour cet employeur

En cas de licenciement, sauf pour faute grave, le marin pêcheur continue son activité pendant la période de préavis qui commence le lendemain de la décision de licenciement.

L’employeur ne peut pas licencier un marin en CDD, il doit attendre la fin de son contrat, sauf en cas de faute lourde ou de force majeure.

Le marin en CDI a le droit de toucher une « indemnité minimum de licenciement » s’il a au moins 3 ans d’ancienneté sans interruption chez le même armateur (pas nécessairement sur le même bateau).

7. Le livret professionnel du marin pêcheur (Arrêté N°2240 du 28 décembre 2011)

Les marins pêcheurs se verront délivrer un livret professionnel. Il accompagne les marins tout au long de leur carrière.

Il s’agit d’un document où seront consignés :

  • tous les armements pour lesquels le marin a travaillé ;
  • tous les embarquements qu’il a effectués ;
  • les fonctions exercées par le marin à bord ;
  • les visites médicales effectuées ;
  • les titres de formation professionnelle détenus.

Il permettra de déterminer le temps de navigation du marin pêcheur et d’établir un relevé des périodes d’activité afin de faire valoir ses droits à la retraite.

L’employé doit toujours avoir son livret à jour. Dès qu’un marin embarque sur un bateau de pêche, le livret doit être rempli.

Le livret professionnel est délivré par la Direction Polynésienne des Affaires Maritimes (DPAM). Le marin doit en faire la demande.

Rappel aux armateurs : Avant de partir en mer, l’armateur ou le capitaine doit impérativement déposer une liste d’équipage à la Direction Polynésienne des Affaires Maritimes (soit à la cellule « gestion des marins », soit dans la boîte aux lettres se trouvant à l’extérieur du bâtiment du côté du chantier naval, soit dans celle de la Direction des ressources marines (DRM)). Tous les employés de l’armement, à terre ou en mer, doivent passer obligatoirement une visite médicale une fois par an.

8. Les conditions de travail

La durée du travail (LP Partie 1, titre II, chapitre III)

La durée du travail est comptabilisée en jours de mer. La durée annuelle légale du travail du marin pêcheur est fixée à 240 jours de mer par année civile (de janvier à décembre).

Il faut retenir que la notion du jour de mer telle que présentée dans le statut est nouvelle. Le travail à terre pour préparer le bateau, le décharger, le nettoyer et l’entretenir avant ou après la campagne est compté comme des jours de mer.

  • Si le marin travaille plus de 6 h dans une journée à terre, il doit être payé un jour de mer entier
  • Si le marin travaille moins de 6 h dans la journée à terre, il n’est payé qu’un demi-jour

Au-delà de 240 jours/an, le travail du marin est payé en jours supplémentaires.

La durée maximale du travail est fixée à 275 jours de mer par année civile pour un marin pêcheur. Celui-ci n’a pas le droit de travailler plus que 275 j/an, même si son armateur est prêt à le payer plus, et même s’il change d’employeur.

Ce nombre de jour maximum de travail a été défini conformément aux réglementations internationales pour des raisons de santé et de sécurité.

Si le contrat d’engagement mentionne une durée inférieure à 240 jours de mer, le contrat est réputé être à temps partiel.

Dans le cadre d’un contrat à temps partiel, si l’armateur souhaite augmenter la durée du travail de plus de 1/3 de la durée écrite initialement dans le contrat, il doit modifier ce contrat.

Le repos (LP Partie 1, titre II, chapitre IV)

Le repos par jour de travail en mer :

Le marin pêcheur doit prendre des heures de repos en mer. En mer, le marin a droit à 10h de repos par jour, donc par tranche de 24h.

Si le travail en mer est trop important (plus particulièrement sur les thoniers : beaucoup de poissons, ligne cassée…), le marin pêcheur peut prendre ces 10 h de manière fractionnée, donc en plusieurs fois. Néanmoins, le marin doit prendre un minimum de 4 heures de repos par jour de travail.

Le capitaine doit consigner dans le journal de bord toutes les heures de repos prises chaque jour en mer. Le capitaine doit veiller à ce que le marin pêcheur puisse prendre ses heures de repos à un autre moment en mer pour compenser les jours où il y a trop de travail, par exemple pendant les jours de route.

Néanmoins, au retour du bateau au port, si le marin n’a pas pu avoir ses 10 heures de repos par jour, ce repos doit être rattrapé à terre.

Le repos non pris en mer est compensé à raison d’une ½ journée de repos à terre par tranche de 6h non prise. Ce repos n’est pas payé.

Rappel : Le capitaine doit tenir un journal de bord dans lequel il écrit l’organisation du repos sur le bateau. Le capitaine est responsable de la gestion des temps de repos de l’équipage, son rôle est essentiel.

Le repos hebdomadaire

Le marin a également droit à un jour de repos par semaine, correspondant au dimanche pour les salariés terrestres. Il a donc droit, pour un contrat à plein temps d’un an, à 52 jours de repos (non payés) par an.

Ce jour de repos par semaine ne peut pas être pris en mer, car il doit correspondre à 24h de repos consécutives, et doit donc être récupéré une fois que le marin revient à terre, entre deux campagnes de pêche par exemple.

Les congés payés (LP Partie 1, titre II, chapitre VI)

Pour 7 jours de travail, le marin a droit à 1 jour de congé payé.

Pour un contrat à temps complet annuel, le marin à droit à 35 jours de congés payés.

(240 / 7 = 34,3 jours soit 35 jours de congés)

En cas de contrat à temps partiel, le nombre de jours de congés payés est calculé proportionnellement au nombre de jours de mer prévus au contrat. Par exemple, pour un contrat de 120 jours de mer, le marin aura droit à 120 / 7 = 17,1 soit 18 jours de congés payés.

Ces congés doivent être payés aux marins, en plus de leurs parts de pêche ou du salaire plancher pêche, le mois où ils ont été posés.

Le principe de rémunération des congés est exposé et illustré par des exemples dans la partie « La rémunération : le salaire du marin-pêcheur ».

Découpage d’une année de travail à plein temps

Dans le cadre d’un contrat à plein temps d’une année, le marin doit avoir 240 jours de mer ou jours de travail, et 35 jours de congés payés. Ces congés sont payés en plus des parts de pêche.

Le marin doit aussi avoir au minimum 52 jours de repos, qui correspondent aux repos hebdomadaires ou dimanches pour les salariés terrestres.

Le marin peut effectuer jusqu’ à 35 jours de travail supplémentaires, payés à +10%.

L’organisation du travail et la vie à bord

C’est le capitaine qui organise le travail et dit à chaque membre d’équipage ce qu’il doit faire. Le marin doit lui obéir.

Le pêcheur a droit comme chaque membre d’équipage à une couchette. Il doit emmener ses affaires personnelles.

Le pêcheur a droit à une tenue de travail complète, payée par son armateur, par an.

Le pêcheur est responsable du matériel qu’on lui a confié dans le cadre de son travail à bord.

La représentation des marins à bord (LP Partie 1, titre III)

Chaque entreprise qui a au moins 11 salariés doit avoir un représentant du personnel désigné comme délégué du personnel (un titulaire et un suppléant). Les marins d’un armement peuvent se regrouper, avec les employés à terre, pour atteindre ce quota de 11.

Le délégué du personnel est chargé :

  • de présenter aux armateurs les réclamations individuelles ou collectives concernant les conditions de travail à bord, les salaires, l’application de la législation et la réglementation du travail. Il peut aussi proposer des accords collectifs concernant les règles de travail que l’équipage souhaite avoir à bord du navire ;
  • de prévenir l’inspection du travail en cas de non respect des conditions réglementaires de travail.

La santé et la sécurité (LP Partie 1, titre IV)

Dans le cas de blessures ou maladies légères, le marin est soigné à bord.

Dans le cas de blessures ou maladies plus graves, le capitaine contactera un médecin des urgences. Le bateau devra rejoindre l’île la plus proche ayant les moyens de soigner le pêcheur ou disposant d’un aéroport pour rapatrier le marin blessé sur Papeete.

Dans le cas où le marin est débarqué parce qu’il est malade ou suite à un accident, le marin a droit à sa part de pêche, même s’il n’a pas fini la campagne, car il n’a pas commis de faute. Les frais de rapatriement du marin, sauf en cas d’évacuation sanitaire (EVASAN), sont à la charge de l’armateur.

Il est important de savoir que l’armateur a le devoir de prendre toutes les mesures possibles pour assurer à ses marins les meilleures conditions de santé, d’hygiène et de sécurité à bord du bateau. A ce titre, il fournit gratuitement une fois par an aux marins pêcheurs les équipements individuels nécessaires à leur travail (ciré, bottes…).

Les sanctions attribuées au marin (LP Partie 1, titre V)

L’armateur qui envisage de sanctionner un marin pêcheur à la suite d’une faute commise doit convoquer son employé à un entretien par courrier. Dans ce courrier, il doit écrire l’heure, la date et le lieu de l’entretien. Il faut que la sanction qu’il donne soit écrite dans le journal de bord, même si la faute est commise à terre.

En mer, c’est le capitaine qui représente l’armateur. Il est responsable de la discipline à bord. Il peut décider que le marin pêcheur qui a commis une faute arrête immédiatement son travail à bord en attendant la sanction, pour que l’armement continue à bien fonctionner.

Pour des raisons de sécurité pour les autres membres de l’équipage, il peut même être décidé que le marin soit rapatrié ou remis aux gendarmes.

La faute grave est un motif de licenciement, et l’employé n’a alors pas droit au préavis, ni à l’indemnisation. Il est donc très important de toujours respecter les règles établies. Les conséquences d’un mauvais comportement peuvent être très lourdes.

Si le marin fait une faute grave, le capitaine a le droit de procéder à une mise à pied et de le débarquer au milieu de la campagne de pêche ; il perd alors sa part de pêche pour cette campagne.

9. La rémunération : le salaire du marin pêcheur
(LP Partie 1, titre II, chapitre V et Arrêté  N° 2242 du 28 Décembre 2011)

Le principe du partage de la pêche et de la rémunération « à la part » sont maintenus.

Le marin reste payé selon le résultat de la pêche et ne doit pas, en principe, avoir un salaire fixe tous les mois.

Le statut mis en place oblige seulement les armateurs à verser un salaire minimum aux pêcheurs. Ce salaire minimum est appelé Salaire Plancher Pêche (SPP).

Cela signifie qu’au minimum le pêcheur doit toucher le SPP, même si les résultats de la pêche ont été mauvais ou même s’ il a été en repos tout le mois.

Le montant de ce salaire plancher pêche est fixé par le conseil des ministres. En 2013, le SPP a été fixé à 95 000 Fcfp par mois, pour un contrat à temps plein.

La part de pêche

La part de pêche correspond au salaire versé à l’issue d’une campagne de pêche.

Cette part de pêche est calculée à partir de la recette nette, c’est-à-dire à partir du montant total des ventes réalisées moins l’ensemble des charges communes.

On appelle « recette brute » la recette retirée de la vente des poissons.

On appelle « recette nette » la différence entre la recette brute et les charges communes.

Le mode de calcul de la part de pêche est schématisé dans la figure 4 ci dessous.

Les charges communes

On appelle « charges communes »  les consommables dont on a besoin pour partir en campagne de pêche. La liste de ces charges a été fixée par un arrêté pris en conseil des ministres, après négociation entre les syndicats de salariés et d’armateurs.

Les charges communes regroupent :

  • carburant ;
  • lubrifiants ;
  • glace ;
  • filtres ;
  • nourriture pour l’équipage (vivres) ;
  • appâts ;
  • films (utilisés pour l’emballage des filets de poisson) ;
  • pharmacie (renouvellement uniquement) ;
  • caisse à outils (renouvellement uniquement) ;
  • piles électriques ;
  • batteries et les feux des balises gonio ;
  • fréon (gaz frigorigène) : on inclut dans les charges communes la recharge normale en dehors de toute défectuosité du système froid ;
  • petit matériel de pêche comprenant l’ensemble des fournitures entrant dans les lignes secondaires, du snap à l’hameçon inclus ;
  • redevances au débarquement ;
  • produits d’entretien pour le nettoyage courant du navire.

La liste des charges communes établie par l’armateur dans une fiche de pêche est consultable à tout moment par l’équipage.

Les charges armateur

On appelle « charges armateur » toutes les charges qui ne sont pas directement liées à l’opération de pêche et plus globalement la totalité des charges autres que les charges communes. C’est l’armateur qui les paie seul, donc elles ne sont pas prises en compte pour calculer la paie du marin.

Il y a dans les charges armateur :

  • charges liées au financement du navire (frais bancaires etc) ;
  • frais de gestion ;
  • entretien du navire ;
  • réparations ;
  • carénage ;
  • assurances + responsabilité civile ;
  • premier équipement et équipement supplémentaire concernant le gros matériel et équipements de pêche ;
  • les balises gonio ;
  • gaz frigorigène (fréon) lorsqu’il est établi un dysfonctionnement du système froid ;
  • la ligne mère et la remise à niveau de sa longueur initiale le cas échéant ;
  • frais d’analyse et de contrôle sanitaire ;
  • taxes diverses ;
  • rémunération du gérant éventuel ;
  • vêtements de travail : équipement initial, renouvellement annuel ou suite à une usure normale due à l’activité. En dehors de ces cas, le remplacement est à la charge directe des pêcheurs.

La répartition entre armateur et équipage

La recette nette est répartie selon le type de bateau :

  • thoniers (1ère et 2ème catégorie) : 60% armateur / 40% équipage
  • bonitiers et poti marara (3ème et 4ème catégorie) : 50% armateur / 50% équipage

La part de la recette nette qui revient à l’équipage est appelée la « part équipage ».

Le partage entre les membres d’équipage

La fonction occupée, le nombre de parts de pêche fixes et l’amplitude de parts variables pour chaque fonction doivent être mentionnés dans le contrat d’engagement.

Le nombre de parts attribué à chaque membre d’équipage est déterminé par l’armateur sur proposition du capitaine et doit être spécifié dans le contrat d’engagement.

La part de base est calculée de la manière suivante :

Part équipage / nombre total de parts

Si le marin pêcheur exerce plusieurs fonctions à bord, le nombre de parts peut être cumulé.

La fiche de partage

A chaque retour de pêche, l’armateur remplit une « fiche de partage » encore appelée fiche de campagne ou fiche de pêche qui peut être consultée par l’équipage (figure 5).

Il détermine la recette brute, la recette nette et la répartition des parts de pêche entre les membres d’équipage pour la campagne effectuée.

Le Salaire Plancher Pêche ou SPP

Dorénavant l’armateur est obligé de verser chaque mois un salaire minimum au marin, même si le résultat de la pêche est mauvais, ou même s’il est en repos durant tout le mois.

On appelle ce salaire minimum le Salaire Plancher Pêche (SPP en abrégé).

Le montant de ce salaire plancher pêche est fixé par le conseil des ministres. En 2013, le SPP a été fixé à 95 000 Fcfp / mois, pour un contrat à temps plein.

Si le contrat d’engagement mentionne une durée inférieure à 240 jours de mer, le contrat est réputé être à temps partiel. Le salaire minimum est alors calculé proportionnellement au nombre de jours de mer indiqué dans le contrat de travail.

Par exemple, si pour un contrat de 240 jours de mers, le SPP est de 95 000 Fcfp / mois, alors pour un contrat de 120 jours de mer (dit à mi temps), la rémunération garantie par mois sera de 95 000 / 2 =  47 500 Fcfp.

Le SPP ne fonctionne pas de la même façon que le SMIG terrestre. Le SPP est une sécurité qui assure un revenu minimum au pêcheur mais le principe de la rémunération reste la part de pêche.

Donc dans le cas où pour un mois civil, le salaire est inférieur au SPP, l’armateur doit quand même verser le SPP au pêcheur à la fin du mois. L’armateur paie la différence sur la part « armateur ».

L’armateur peut néanmoins compenser cette « avance » mais seulement sur le mois suivant, dans la mesure où le salaire du mois suivant est supérieur au SPP. Dans le cas de campagne de pêche de longue durée, étalée sur plusieurs mois, l’armateur peut récupérer les avances au retour de cette campagne.

Si une campagne de pêche s’étale sur plusieurs mois, chaque mois passé en mer l’armateur doit verser le SPP sur le compte bancaire du pêcheur. Au retour de la campagne ces avances seront déduites de la part de pêche.

Le paiement de la campagne de pêche fera partie du salaire du mois correspondant au retour du bateau.

Exemples de calculs

Exemple 1 :

La pêche a été mauvaise en mai. Le marin termine une campagne qui ne lui rapporte qu’une part de pêche de 50 000 Fcfp. Elle est donc inférieure à 95 000 Fcfp qui est le montant du SPP.  L’armateur verse quand même 95 000 Fcfp à son marin pour le mois de mai. Il lui a donc versé 45 000 Fcfp en plus.

En juin, la pêche est meilleure. Le marin termine une campagne qui lui rapporte une part de pêche de 150 000 Fcfp. L’armateur peut récupérer ce qu’il lui a versé en compensation en mai par rapport à ses parts de pêche. Il peut donc récupérer 40 000 Fcfp. Il ne verse alors au marin que 110 000 Fcfp au mois de juin, qui reste un montant supérieur au SPP.

Exemple 2 :

La pêche a été mauvaise en mai. Le pêcheur termine une campagne qui ne lui rapporte qu’une part de pêche de 50 000 Fcfp. Elle est donc inférieure à 90 000 Fcfp qui est le montant du SPP. L’armateur verse quand même 90 000 Fcfp au marin pour le mois de mai. Il lui a donc versé 40.000 Fcfp en compensation.

En juin, la pêche est moyenne. Le marin termine une campagne qui lui rapporte une part de pêche de 110 000 Fcfp. L’armateur ne peut pas récupérer la totalité de la compensation qu’il lui a versée en mai car le pêcheur ne toucherait que 110 000 – 40 000 = 70 000 Fcfp. C’est inférieur au SPP et c’est illégal, car l’armateur doit lui verser le minimum de 90 000 Fcfp. Donc l’armateur ne peut récupérer que 20 000 Fcfp de son « avance » versée en mai.

En juillet, même si la pêche est très bonne et que le pêcheur termine une campagne qui lui rapporte une part de pêche bien supérieure à 90 000 Fcfp, l’armateur n’a pas le droit de récupérer ce qu’il lui a donné en trop au mois de mai.

Exemple 3 :

La pêche a été mauvaise en mai. Le marin termine une campagne qui ne lui rapporte qu’une part de pêche de 50 000 Fcfp. Il repart pour une campagne longue N°2 en mai qui va durer plus de 1 mois. A la fin du mois de mai, son armateur lui remet son bulletin de salaire et lui verse quand même 90 000 Fcfp. Il lui a donc versé 40 000 Fcfp en compensation.

En juin il est toujours en mer, sans revenir au port de Papeete. Son armateur lui verse sur son compte bancaire les 90 000 Fcfp minimum de son salaire de juin.

En juillet, le marin termine la campagne N° 2. La pêche a été bonne et il a droit à une part de 350 000 Fcfp. L’armateur peut déduire ce qu’il lui a versé en trop les mois où la campagne N° 2 a duré, soit 40 000 + 90 000 = 130 000 Fcfp.

Il ne lui versera que :  350 000 – 130 000 = 220 000  Fcfp en juillet.

Exemple 4 :

La pêche a été mauvaise en mai. Le marin termine une campagne qui ne lui rapporte qu’une part de pêche de 50 000 Fcfp. Il repart pour une campagne N°2 en mai, mais elle ne se termine pas dans le mois. A la fin du mois, son armateur lui remet son bulletin de salaire et lui verse quand même 90 000 Fcfp pour le mois de mai. Il lui a donc versé 40 000 Fcfp en compensation.

En juin il est toujours en mer, sans revenir au port de Papeete. Son armateur lui verse sur son compte bancaire les 90 000 Fcfp minimum de son salaire de juin.

En juillet, il termine la campagne N° 2. La pêche n’a pas été très bonne, le marin a droit à une part de 170 000 Fcfp.

L’armateur ne peut pas déduire la totalité de ce qu’il lui a compensé les mois où la campagne N° 2 a duré, soit 40 000 + 90 000 = 130 000 Fcfp. Car s’il le fait, le marin ne toucherait que 170 000 – 130 000 = 40 000 Fcfp. C’est inférieur au SPP et c’est illégal. L’armateur lui verse donc au retour 90 000 Fcfp et ne récupère que 80 000 Fcfp.

La rémunération au delà du temps légal

Si le marin travaille plus que 240 j/ an pour le même armateur, chaque journée supplémentaire sera payée 10% de plus par rapport au montant du SPP.

Les jours payés à +10% n’interviennent qu’au-delà de 240 jours travaillés par an. Il n’y a pas de jours considérés comme supplémentaires dans les contrats à temps partiel.

La durée du travail ne doit pas être mensualisée, autrement dit les marins ne doivent pas considérer une durée légale de 20 jours de mer par mois (240 jours /12 mois = 20 jours / mois), mais considérer l’ensemble des jours travaillés sur une année et attendre d’avoir atteint 240 jours dans l’année avant de pouvoir demander les 10% de majoration.

Exemple de calcul

Le SPP annuel est de 4 500 * 240  = 1 080 000 Fcfp pour 240 jours de mer.

Chaque jour de mer supplémentaire doit être payé au-delà de 240 jours de mer :

4 500 + 10 % = 4 500 + 450 = 4 950 Fcfp.

A la fin octobre, le marin a atteint 230 jours de mer. Au cours du mois de novembre, il fait 20 jours de mer. Il a donc dépassé le nombre de jours de mer légal de 10 jours. Il doit percevoir au minimum en novembre: 90 000 + 4 950 x 10 = 139 500 Fcfp.

La rémunération des congés payés

Chaque jour de congé payé est rémunéré 1/30ème du SPP, soit 90 000 / 30 = 3 000 Fcfp par jour de congé payé, pour un contrat de 240 jours de mer par an.

Si le marin a un contrat à temps partiel, par exemple 180 jours de mer (3/4 temps), le jour de congé payé sera payé 3 000 Fcfp x 3/4 = 2 250 Fcfp.

La paie des congés payés vient en plus des parts de pêche ou du SPP. Les congés payés doivent être payés indépendamment des résultats des campagnes de pêche.

Les congés payés pris dans le courant du mois doivent être payés à la fin du mois.

Lorsque le contrat est rompu alors que le marin n’a pas pu bénéficier de ses jours de congés payés acquis, l’armateur doit les lui payer.

Exemples de calculs

Exemple 1 :

Au mois de mai le marin embauché pour 240 jours annuels est revenu d’une campagne de pêche. Il a eu droit à une part de 40 000 Fcfp.

Il a pris ensuite 10 jours de congés payés avec l’accord de son armateur. Ces jours de congés doivent lui être payés : 90 000 / 30 x 10 = 30 000 Fcfp.

Ensuite il est reparti en campagne jusqu’en juin.

Pour le mois de mai, son employeur devrait lui verser un salaire de 40 000 Fcfp. Or, c’est un montant inférieur au SPP. Il lui verse donc 90 000 Fcfp, auxquels s’ajouteront les congés payés d’une valeur de 30 000 Fcfp, soit un versement total de 120 000 Fcfp. Le marin a reçu 50 000 Fcfp en plus, que l’armateur a le droit de récupérer sur la prochaine campagne.

Il rentre de sa 2e campagne vers la fin du mois de juin. Sa part de pêche est de 180 000 Fcfp. A la fin du mois de juin, il touchera un salaire de 180 000 – 50 000 = 130 000 Fcfp. L’armateur récupère ce qu’il lui a compensé au mois de mai.

Exemple 2 :

Il rentre de campagne au milieu du mois de juin. Sa part de pêche est de 120 000 Fcfp.

Il prend 10 jours de congés payés en accord avec son armateur. Il a donc droit à être payé 3 000 x 10  = 30 000 Fcfp pour ses congés.

A la fin du mois de juin il touchera 120 000 + 30 000 = 150 000 Fcfp.

La fiche de paie ou bulletin de salaire (arrêté N° 2243 CM du 28 Décembre 2011)

C’est le document que doit donner l’armateur tous les mois à ses marins. Il récapitule toutes les parts de pêche qu’ils ont touchées pour le mois écoulé. Il est établi selon les fiches de partage du mois.

Le bulletin de salaire mentionne obligatoirement les informations suivantes :

  • Employeur : Nom, adresse, numéro d’immatriculation, numéro Tahiti, nom et prénom du représentant légal ;
  • Salarié : nom, prénom, fonction(s) exercée(s) à bord ;
  • Le « numéro employeur » de l’armateur à la CPS ;
  • Le nombre de jours de mer effectué ;
  • Le nombre de jours de mer restant avant d’atteindre la durée normale figurant dans le contrat d’engagement (contrat de travail) ;
  • La période de travail à laquelle se rapportent les salaires ;
  • Le complément pour atteindre le SPP (si besoin) ;
  • La majoration pour journées de mer supplémentaires et le taux de majoration appliqué (si besoin) ;
  • L’indemnité de précarité (si besoin) ;
  • La nature et le montant des diverses primes (si besoin) ;
  • La nature et le montant des diverses déductions, comme les compléments SPP ou les avances (si besoin) ;
  • Le montant du salaire brut ;
  • La nature et le montant des diverses cotisations patronales ;
  • La nature et le montant des diverses cotisations salariales ;
  • Le montant des cotisations CST (Contribution de Solidarité Territoriale) ;
  • Le montant du salaire net ;
  • La date de paiement ;
  • Le nombre de jours de congés payés pris et le montant de l’indemnité correspondante.

Il est également recommandé d’indiquer la part des remboursements du Pays pour les cotisations salariales et patronales.

Le bulletin de salaire doit être conservé par le marin durant toute sa vie.

10. La protection sociale et la retraite du marin pêcheur (LP Partie 2)

Les cotisations salariales et patronales

Avec ce nouveau statut, un marin-pêcheur employé sur un thonier, un bonitier ou poti marara est donc au Régime Général des Salariés (RGS). Il en retire des avantages :

  • il bénéficie d’une couverture en cas de maladie (remboursement d’une partie des frais médicaux) et d’une couverture en cas d’accident du travail
  • il cotise pour sa retraite

Pour financer les diverses prestations sociales et le versement des pensions de retraites, la CPS prélève :

  • des contributions aux armateurs : on les appelle les « parts ou cotisations patronales »
  • des cotisations auprès des marins « parts ou cotisations salariales »

Les cotisations pour les couvertures « maladie et accident du travail » sont prélevées sur la base du SPP, quelque soit le salaire réel gagné par le marin.

Les cotisations pour la retraite sont prélevées sur la base du SMIG terrestre.

L’armateur a l’obligation de déclarer les salaires réels de ses marins-pêcheurs à la CPS, et doit payer les cotisations salariales à la CPS qu’il déduit du salaire brut de ses marins.

Ces opérations doivent être reportées dans le bulletin de salaire.

Pour ne pas augmenter de manière trop brutale les charges dues aux cotisations, le gouvernement a fixé une période de 10 ans de transition pendant laquelle il prend en charge une partie de ces cotisations.

Les catégories de cotisations

Le montant des cotisations payées à la CPS dépend du secteur d’activité. La catégorie « pêche hauturière », créée en 2012, comprend les marins pêcheurs de toutes les entreprises exploitant des navires classés en 1e, 2é, 3e et 4e catégorie, armés à la pêche professionnelle, immatriculés en Polynésie française, battant pavillon français et dont les armateurs sont titulaires d’une licence de pêche professionnelle. Elle ne concerne que le personnel embarqué des entreprises.

Le personnel à terre des armements ne fera plus partie de la catégorie « aquiculture-agriculture » de la nomenclature de la CPS, mais sera inclus dans le secteur « commerce de produits, services divers ». Ceci amènera des modifications des taux de cotisations relatives aux diverses branches de cette nomenclature, notamment pour les prestations familiales.

L’armateur est exonéré de la cotisation dédiée à la formation professionnelle.

Les conditions à remplir pour bénéficier de la protection sociale

Tous les salariés ont droit à la protection sociale (assurance maladie – invalidité et accidents du travail – maladies professionnelles). La condition minimale pour le marin pêcheur est d’effectuer au moins 10 jours de mer par mois.

Si le contrat de travail est rompu et que le marin pêcheur a touché un salaire au moins égal au SPP ou qu’il a au moins effectué 10 jours de mer par mois pendant les 12 mois précédents, alors il bénéficie d’une couverture pendant 3 mois après la rupture du contrat, pour lui et ses ayants droit. Si le marin a travaillé 10 jours par mois pendant moins de 12 mois, alors la couverture ne sera que d’un mois après la fin du contrat.

La retraite

L’âge légal d’attribution d’une pension de retraite est fixé à 60 ans avec une durée minimale de 5 années de cotisation, ou, quel que soit l’âge, après au moins 35 années de service validées.

Il est possible de partir à la retraite dès 50 ans, mais un abattement sera appliqué, ce qui veut dire que le marin ne touchera pas la totalité de sa pension de retraite.

Les marins pêcheurs sont exonérés de cotisations de prestations familiales et du fond spécial de l’habitat. Les armateurs n’ont donc pas à payer ces cotisations.

La prise en charge par la Polynésie française (LP Partie 3)

Le statut représente des contraintes administratives et financières supplémentaires pour les entreprises. Le gouvernement accompagnera la profession pour son entrée dans le RGS en prenant en charge une partie des cotisations patronales et salariales dues à la CPS, de façon dégressive sur 10 ans.

  • pour les cotisations « retraite », elles seront payées dans leur totalité pendant la première année par le Pays (parts salariale et patronale). Ensuite, chaque année au 1er janvier, la prise en charge diminuera de 10 % pour être entièrement à la charge des employeurs et des salariés dès la 11e année.
  • pour les cotisations « maladie-invalidité » et accidents du travail-maladies professionnelles »: Le taux des cotisations en vigueur au 01/01/11 est de 16,62 %, répartis à 2/3 pour les employeurs et 1/3 pour les salariés. La 1e année (1er janvier 2012) les employeurs et salariés ne prendront en charge qu’une partie de ces cotisations, soit 9 % au lieu de 16,62 %. Cette partie augmentera progressivement sur 10 ans pour atteindre 16,62 % ou le taux en vigueur au 01/01/22. A l’issue des 10 ans, les cotisations seront entièrement à la charge des employeurs et des salariés.

Le pays n’intervient que sur le complément et de façon dégressive sur 10 ans (tableau 1).

Par exemple, si la 1ere année, les armateurs et pêcheurs paient 9%, le pays prendra en charge 16,62 % – 9 % = 7,62 %.  Ces 16,2% représentent la totalité des cotisations. Les 7,62 % représentent alors presque la moitié des cotisations, soit exactement 45,85 % des cotisations (cf chiffre pour l’année N du tableau 1 ci dessous).

Le principe de répartition des cotisations entre armateurs et marins est le suivant : les armateurs paieront les 2/3 des cotisations et leurs marins le 1/3 restant. Ainsi, sur les 9% payés par la profession pêche la 1ère année, 6% seront supportés par les armateurs et 3% par les marins pêcheurs.

Les déclarations de salaires seront à déposer à la CPS ou à envoyer par mail, ou par fax, à la fin de chaque mois ou au plus tard le 10 du mois suivant.

La Direction des Ressources Marines (DRM) exige les mêmes délais de dépôt des déclarations de salaire que la CPS pour que les remboursements des cotisations aux armateurs soient effectués dans les plus brefs délais.

Tableau 1 : Tableau des taux de prise en charge par le Pays sur les 10 ans en partant des assiettes forfaitaires SPP pour la maladie et accident du travail et SMIG pour la retraite.

11. Fiche récapitulative : Les droits et les devoirs du marin pêcheur

Les droits du marin pêcheur

Le marin doit avoir un contrat d’engagement maritime dès lors qu’il travaille pour un armateur.

Il a le droit d’exiger un CDI s’il travaille durablement au sein de l’armement. Le CDD ne doit être que temporaire ou occasionnel. Il aura droit à une indemnité de précarité s’il est en CDD.

Il a droit à  un salaire minimum mensuel (SPP) de 90 000 Fcfp s’il travaille à plein temps.

Dans l’année, si le marin a travaillé plus de 240 jours, il devra être payé en heures supplémentaires. Cependant, il ne doit pas effectuer plus de 275 jours de mer par an.

Il a le droit à du repos, des congés payés, une protection sociale, une retraite, des prestations familiales et globalement à toutes les prestations sociales auxquelles a droit un salarié, au titre de son entrée dans le RGS.

Il a le droit de consulter la fiche de partage à l’issue de chaque campagne de pêche.

Le marin a le droit à l’équipement de sécurité et d’hygiène nécessaire pour mener à bien la campagne de pêche, fourni par son armateur (équipement initial et renouvellement dû à une usure normale).

Les devoirs du marin pêcheur

Le marin doit effectuer une visite médicale préalable à son embauche et tous les ans ensuite afin de s’assurer qu’il est apte à manipuler les produits de la pêche destinés à la consommation humaine et vivre en communauté sur un bateau.

Le marin doit respecter l’engagement qu’il a pris auprès d’un armateur. S’il est en CDI pour un armateur donné, il ne peut travailler pour un autre employeur. Le marin doit se fidéliser autant que possible à un armement.

Le marin doit obéir aux ordres de l’armateur et du capitaine qui est son représentant à bord et il doit effectuer le nombre de jours de travail pour lequel il s’est engagé.

Il a le devoir de prendre soin du matériel qu’il lui a été fourni par son armateur.

Il a le devoir de respecter les autres membres d’équipage à bord, afin que la campagne de pêche se déroule bien.

Dans le cadre de l’engagement de la Polynésie auprès des autres pays du monde, il a le devoir de respecter l’interdiction de pêche de toutes les espèces de requins, tortues, oiseaux et mammifères marins. Il doit relâcher ces espèces dans de bonnes conditions s’ils sont capturés vivants par les engins de pêche, afin d’en assurer une chance de survie optimale.

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12. Fiche récapitulative : Les droits et les devoirs de l’armateur

Les droits de l’armateur

L’armateur a le droit d’évaluer les aptitudes des marins qu’il souhaite engager avant d’établir leur contrat en CDI ou CDD, pendant la période d’essai.

L’armateur a le droit de suspendre le contrat du marin pêcheur s’il est absent à l’heure du départ du navire pour une campagne de pêche.

Si le marin a commis une faute grave ou ne travaille pas sérieusement, l’armateur a le droit d’engager une procédure de licenciement.

Les devoirs de l’armateur

L’armateur a le devoir d’établir un contrat de travail pour son marin. Tout marin travaillant sans contrat est considéré comme clandestin. L’armateur est passible de poursuites pour fraude.

La norme d’engagement pour les marins doit être le CDI. Le CDD ne doit être que temporaire ou occasionnel et non le mode d’engagement prédominant au sein de l’armement.

Dans le contrat d’engagement, l’armateur doit écrire s’il s’agit d’un CDD ou CDI, la fonction qu’occupera le marin, la durée de la période d’essai, la date à laquelle il commencera à travailler, et le(s) bateau(x) sur le(s)quel(s) il embarquera. Il devra aussi préciser le nombre de jours de mer prévu quand ce nombre est inférieur à la durée légale prévue par le code du travail. Il devra informer que le pêcheur est rémunéré à la part, et prévoir de faire figurer les informations suivantes :

  • les modalités de calcul de la recette nette qui résulte de la différence entre la recette brute et les charges communes ;
  • la liste des charges communes ;
  • les modalités de répartition de la recette nette selon la réglementation en vigueur ;
  • la répartition des parts équipage par fonction ;
  • le nombre de parts de pêche fixes et l’amplitude de parts variables attribuées au marin-pêcheur selon les fonctions telles que prévues à l’article 8 de l’arrêté N° 2241 CM ;
  • les modalités de calcul de l’indemnité de précarité en cas de contrat à durée déterminée.

L’armateur doit au moins verser un salaire mensuel d’un montant égal au SPP au marin pêcheur s’il est engagé sur la base de 240 jours de mer.

Le contrat d’engagement maritime mentionne les cas de suspension du contrat d’engagement maritime tels que prévus aux articles LP 7522-1 à LP 7522-2  et dans le code du travail.

Le contrat d’engagement maritime indique les cas de rupture du contrat, à savoir :

  • démission du marin pêcheur ;
  • licenciement ;
  • délais du préavis selon le cas de rupture ;
  • condition de rupture, droit et obligation de l’employeur et de l’employé ;
  • indemnité de licenciement.
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13. Fiche récapitulative : Les procédures à suivre

Immatriculation à la Direction des ressources marines

L’armateur doit fournir au comptable de la Direction les pièces relatives à son entreprise : RC, N° Tahiti, RIB, statuts de l’entreprise. Elles seront nécessaires pour le remboursement de la part des cotisations prises en charge par le Pays.

Immatriculation en tant qu’employeur à la CPS

Il faut remplir le formulaire « répertoire des employeurs » et fournir les N° Tahiti, RC et statuts de l’entreprise. Il est alors donné un « numéro d’employeur » à l’armateur constitué de 8 chiffres.

Le recrutement

L’armateur doit établir une Déclaration Préalable A l’Embauche (DPAE) nominative pour chaque marin à déposer à la CPS au plus tard le jour de l’embauche, juste avant le départ du bateau, avec une pièce d’état civil de ce marin.

L’armateur doit établir un contrat à son marin que chacun devra signer. Un exemplaire devra être remis au marin avant appareillage du navire, et un autre à la Direction Polynésienne des Affaires Maritimes (DPAM).

La DPAM établit le livret professionnel maritime à la demande du marin (formulaire de demande).

La rupture du contrat

Si le marin ou l’armateur souhaite rompre le contrat pendant la période d’essai, cela se fait simplement, sans formalité administrative.

Si le marin souhaite démissionner et qu’il n’est plus dans sa période d’essai, il devra donner un préavis de 1 mois à son armateur.

Si un armateur souhaite licencier un pêcheur, il doit également lui donner un préavis. Si le marin a travaillé moins de 5 ans pour lui, le préavis ne sera que de 1 mois. Au delà, il sera de 2 mois.

La déclaration de salaire

Après avoir établi les fiches de partage, l’armateur édite un bulletin de salaire et doit remplir une déclaration de salaire qu’il doit fournir avant le 10 du mois suivant à la CPS et à la Direction des Ressources Marines.

Les déclarations de salaires sont à déposer mais peuvent être également envoyées par mail, ou par fax.

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